Rahum Brown l’artiste derrière la série évènement sur le French Throwdown.

Vous en avez sans doute vu passer sur votre feed le teaser la série documentaire « Build the French ». 4 épisodes consacrées à celles et ceux, athlètes comme bénévoles, qui font le French Throwdown depuis 2013. Cette série a en toile de fond les efforts cumulés de sportifs connus comme inconnus, tels que Romain Fellonneau, Antoine Dumain, Lucas Heuze ou encore Willy Georges.

Mais qui se cache derrière ce récit documentaire ? C’est pour répondre à cette question que nous sommes partis à la rencontre de son réalisateur Rahum Brown. Voici quelques morceaux choisis de l’interview accordé par ce dernier à la rédaction de ALLOUT.

Pour commencer, peux tu te présenter pour ceux et celles qui vont se plonger dans le visionnage de cette série documentaire?

Je m’appelle Rahum Brown (prononcez « Rahim » ndlr), je suis américain originaire de New York. Plus précisément du Bronx, du « Boogie-Down Bronx » comme on dit chez chez. C’est à l’adolescence que j’ai forgé l’ambition de travailler dans l’industrie cinématographique et c’est ce que j’ai fait dès mes 18 ans. Mon premier véritable poste fut celui d’assistant de production sur un film de Spike Lee intitulé A Huey P. Newton Story. Une petite production devenue un téléfilm.

Mon entrée dans cette industrie, je la dois à un homme travaillant dans la production d’oeuvre audiovisuelles dans mon Eglise à Harlem. Il était le Production Manager de Spike Lee. Nous étions en l’an 2000 et j’allais sur mes 18 ans. A l’époque c’est ma mère qui s’était chargée des présentations:
– » Es-tu prêt à travailler dur, sans te cacher derrière des excuses pitoyables ? » m’avait-il demandé.
J’ai aussitôt répondu:
-« Oui Monsieur. » Dès lors j’étais devenu un professionnel de l’industrie du cinéma.

Son nom était John et c’était le professeur le plus attentionné, méchant, bon et à la fois intransigeant que j’ai jamais eu. Il m’a contraint à connaître le nom de chaque équipement que nous utilisions et il détestait les raccourcis. Il m’a appris la valeur de l’organisation et de la recherche de la perfection. On dit souvent en anglais “Practice makes perfect” mais John dirait “Perfect practice makes perfect.”  C’est ma figure paternelle dans le monde du cinéma, il a été mon professeur de cinema avant que je n’étudie la matière sur les banc de l’école. Et je l’entends encore me remonter les bretelles en cas de faux pas.

Raconte nous ta découverte du CrossFit® et ce qui t’a tellement captivé que tu as voulu raconter des histoires autour de la méthodologie.

J’ai quitté les Etats-Unis en 2016 pour rejoindre ma femme et ma file. Avant cell, j’avais entendu parlé du CrossFit® et avais pu voir quelques exploits de Rich Froning aux CrossFit Games. Mais jamais je n’aurais pensé que c’était pour moi. Oui j’allais bien dans une salle de sport et je faisais du basketball pour m’entretenir, mais en regardant les Games et « Every Second Counts » (selon moi le meilleur documentaire sur le CrossFit à ce jour), je ne pensais pas que c’était pour moi. Pour tout dire à cette époque je devais avoir fait en tout et pour tout 5 tractions dans toute ma vie.

Vivant en France depuis 3 mois, j’étais au bord de la dépression et j’avais le mal du pays. J’avais abandonné ma carrière professionnelle à New York pour être avec ma famille. Je n’avais aucun contact, aucune perspective d’emploi, aucun moyen de gagner de l’argent et je ne parlais pas le Français. Pour la première fois de ma vie, j’étais vraiment perdu. Alors j’ai marché. J’ai parcouru pas mal de km. J’ai marché jusqu’à ce que j’aperçoive au loin une lumière provenant d’un local. Comme dans un film du Seigneur des Anneaux. Je me suis dirigé vers cette lumière, j’ai regardé à l’intérieur du local et j’ai vu ces « Frenchies » vraiment en forme soulever des tonnes de fonte.

J’ai tout de suite compris que ces gars-là faisaient ce que fait Rich Froning. Je suis donc entré dans 197-Box à Bordeaux, et j’ai rencontré le Head Coach Hocine et sa défunte épouse Priska (une danseuse extraordinaire et la personne la plus douce que j’aie jamais rencontrée de ma vie). Ils ont été d’une gentillesse incroyable et m’ont énormément aidé, moi et ma famille. Sachant que je n’avais pas d’argent, Hocine et Priska ont conclu un accord selon lequel si je produisais des vidéos pour la box, je pourrais suivre des cours gratuitement. Eh bien, inutile de dire que j’y suis allé 5 jours par semaine pendant trois ans. MDR! Je suis devenu obsédé, j’ai participé à des compétitions locales, j’étais accro. J’ai été impressionné de pouvoir passer de 3 tractions à 100 ! De pouvoir faire un ring muscle up et soulever 3 fois mon poids. Le CrossFit® a changé ma façon d’aborder ce que je pensais être mes limites. C’est un programme de remise en forme presque parfait s’il est suivi correctement, et il m’a conduit sur une voie que je n’aurais jamais imaginé emprunter.

Explique nous l’aventure que tu as vécu en filmant ces 4 épisodes du documentaire. C’est une première dans le paysage du CrossFit® en France !

Un jour, ma femme m’a convaincu d’aller suivre le Séminaire d’entraîneur CrossFit® de Niveau 1 à Paris, alors je l’ai fait. L’un des traducteurs de l’anglais au français était ce mec charismatique, énergique et en forme nommé Elie Margerin (l’auteur de l’article dément toute ressemblance avec cette description). J’ai suivi le cours, j’ai réussi le test et je n’y ai plus pensé.
Un an ou deux plus tard, Elie approche Daniel Chaffey et a l’idée de réaliser une vidéo sur les moments forts du French Throwdown. A cette époque j’avais déjà réalisé une centaine de ces vidéos, j’ai donc demandé à Daniel si il serait envisageable de suivre 3 athlètes autour d’un récit en 4 épisodes et il a accepté.

C’était ambitieux. Réaliser un film, une émission de télévision ou un documentaire, cela coûte très cher. Notamment parce que cela demande de coordonner des équipes souvent importantes. J’ai vite réalisé que nous n’avions pas ces moyens, mais pas de soucis, j’étais tellement chaud pour faire cette série, je m’en fichais. Je me suis dit : « si je dois tout faire moi-même, tant pis ». J’ai tellement bossé sur ce projet que cela aurait pu être mes derniers mots lol !

Qui plus est, nous avons lancé le projet sur le tard et toutes les équipes des boxs du Louvre et du French Throwdown croulaient déjà sous le travail.

Les choses ont néanmoins fini par se débloquer, Myriam a organisé des entretiens avec certains membres du personnel et des athlètes et Julian Festor, organisateur du la compétition à l’époque, a même fourni le générique original de la série.

Ayant passé mon enfant dans le quartier pour le moins sensible du Bronx, le cinéma et la télévision ont été mon évasion et m’ont aidé à voir un monde plus grand que la mort et la destruction auxquelles j’étais constamment confronté. Quoi qu’il en soit c’est de là que me sont venues les ressources pour mener ce projet à la force de mes deux bras !

Ce fut un véritable marathon, je suivais 6 athlètes et j’enregistrais les temps forts de chaque épreuve. C’était beaucoup de séquences, beaucoup de marche et de transport de matériel lourd. Et, pour compliquer encore plus les choses, je devais interagir dans une langue que je ne parle pas quasiment pas. Du début à la fin, cela a été un véritable test de volonté, de compétence, de patience et d’autonomie. Si jamais je dis que j’ai travaillé sur un projet de film qui était un travail d’amour, « Building The French » a été mon travail d’amour. Ce qui a commencé comme une idée pour mettre en valeur le French Throwdown s’est transformé en une véritable obsession.

Mon but était de rendre justice à Marius, Romain, Tahini et l’équipe 197-No-Rep avec le peu que j’ai filmé. J’ai oeuvré sur ce film pendant 1 an tout en travaillant à côté pour continuer à subvenir à mes besoins. Je travaillais sur la série la nuit, j’essayais de travailler sur d’autres projets le jour afin d’avoir les moyens de continuer à travailler sur la série. Mais en toute honnêteté, j’ai aimé faire ça, et j’espère que tout le monde appréciera le rendu final. Si vous regardez de plus près, vous ressentirez cette énergie car j’ai mis mon coeur dans ce projet.

La réalisation de films, quels qu’ils soient, est vraiment un travail d’équipe. C’est ce que j’aime dans le processus. Je suis un solitaire dans la vie mais un extraverti avec le travail. J’aime l’effort de collaboration dans le film. Pour moi, ce n’est pas qu’un travail, je ne suis pas là pour l’argent. Le cinéma est le Saint Graal. La narration existe depuis que l’homme grognait et se frappait sur la tête avec des pierres, et elle sera là jusqu’à la fin des temps. Une belle histoire peut inspirer et donner au spectateur une vision.

Où pouvons nous visionner ton travail et ainsi soutenir ton projet?

Pour l’instant Vous pouvez voir les 4 épisodes sur www.buildingthefrench.com. C’est vraiment amusant. Si vous aimez le fitness, vous allez adorer cette série ! Si vous avez besoin de vous motiver avant un WOD, c’est la série à voir ! Si vous voulez en savoir plus sur le processus de préparation de ces incroyables athlètes pour une compétition comme le French Throwdown, ruez vous sur la série.

Il était important de montrer tous les niveaux d’athlètes, débutants comme confirmés et comment ils gèrent la victoire et la défaite. Il y a beaucoup de drame et d’émotion brute. C’est un environnement très riche.

Quels sont tes plans pour le futur ?

En ce moment, je travaille sur deux projets. Le premier, basé sur une histoire vraie, raconte le parcours d’un immigré sénégalais en venu en France et son combat pour trouver sa place dans ce pays. Le second projet est une version réinventée de Building The French qui sera plus approfondie et ciblée. Nous suivrons cette fois trois athlètes féminines. Le titre est encore confidentiel mais j’espère en faire un film de 90 minutes au lieu d’une série. L’objectif serait de le sortir l’année prochaine.

Pour ce projet, j’ai embarqué avec moi Elie, le très talentueux (l’auteur de l’article ce dédouane de cette description de nouveau) que j’appelle « French Joe Rogan », « French Morgan Freeman », et avec la super productrice exécutive Kahina de Sans Filtre Productions. Je suis très excité de travailler avec ces deux-là, car leurs cœurs sont au bon endroit. Nous prenons du plaisir à travailler ensemble et j’ai hâte de voir ce que cela peut donner pour la suite.

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